L’Église catholique peut refuser d'effacer la mention d'un baptême de ses registres, l'intérêt de l'Eglise à conserver ces données primant sur la volonté d'un individu souhaitant qu'elle soit supprimée, selon une décision du Conseil d'Etat consultée par l'AFP samedi.
"L'intérêt qui s'attache, pour l'Eglise catholique, à la conservation des données personnelles relatives au baptême (...), doit être regardé comme un motif légitime impérieux, prévalant sur l'intérêt moral du demandeur" souhaitant "que ces données soient définitivement effacées", estime la haute juridiction administrative dans cette décision rendue vendredi.
Dans l'Eglise catholique, le baptême ne peut être reçu "qu’une seule fois dans la vie d’une personne, exigence à laquelle pourrait faire obstacle l'effacement définitif de l'enregistrement" si l'intéressé souhaitait, plus tard, "réintégrer la communauté chrétienne", ajoute-t-elle.
Le Conseil d'Etat avait été saisi par une personne qui contestait le fait que la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ait clôturé sa plainte relative à la mention des données à caractère personnel le concernant contenues dans le registre des baptêmes du diocèse d'Angers.
Le Conseil d'Etat invoque la possibilité, pour toute personne baptisée, de "faire apposer sur le registre une mention faisant état de sa décision de renoncer à tout lien avec la religion catholique".
Compte tenu du caractère "non dématérialisé" des registres, les "données ne sont accessibles qu'aux intéressés pour les mentions qui les concernent, ainsi qu'aux ministres du culte et aux personnes œuvrant sous leur autorité", relève la juridiction.
"Ces données ne sont pas accessibles à des tiers" et conservées "dans un lieu clos", ajoute-t-elle.
En 2014, la Cour de cassation avait déjà rejeté le pourvoi d'un homme qui souhaitait voir disparaître du registre paroissial la mention de son sacrement. Elle avait estimé que "dès le jour de son administration et en dépit de son reniement, le baptême constituait un fait dont la réalité historique ne pouvait être contestée".
La décision du Conseil d'Etat est "intéressante" compte tenu du fait que c'est la première fois qu'il a à se prononcer dans le cadre de l’application du Règlement général de protection des données (RGPD), en vigueur en France depuis 2018, note Nicolas Hervieu, professeur de droit public.
"Mais il s'agit de la position du Conseil d’Etat français qui interprète le droit européen. Il n’est pas certain que des Cours suprêmes dans d’autres Etats de l'UE statuent dans le même sens", dit-il à l'AFP. "Certaines pourraient potentiellement interroger la Cour de Justice de l’UE" sur ce point, or c'est "elle qui a le dernier mot".
La Rédaction (avec AFP)